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Centralisation des forces : analyse d’une dynamique de fond
Face à une concurrence accrue et des attentes en constante évolution de la part des consommateurs, le marché français de la cuisine professionnelle connaît depuis de nombreuses années une profonde transformation. Des fabricants aux clients finaux, en passant par les installateurs et distributeurs, tous les maillons de la chaîne de valeur sont concernés par cette même tendance : le regroupement des acteurs et la centralisation des forces.
Cette dynamique, loin d'être récente, s'est considérablement accélérée ces dernières années. Pour notre réseau, comprendre et anticiper ces évolutions est essentiel pour nous améliorer sans cesse et continuer à répondre efficacement aux besoins du marché. Plongée au cœur d'une transformation qui redessine les contours du secteur.
Une tendance générale qui traverse tous les secteurs
La centralisation des forces n'est pas propre au secteur de la cuisine professionnelle. On observe aisément ce phénomène dans de nombreux domaines économiques, pour ne pas dire tous, des grands groupes automobiles aux enseignes de grande distribution. « En réalité, notre secteur d’activité ne fait que suivre le marché du particulier : citez-moi un magasin de jouets qui ne soit pas JouéClub ou la Grande Récré. Ou pour le sport, Décathlon ou Intersport », décrypte Vincent Bretonnière, associé EuroChef et dirigeant de Dima. En effet, sauf à chercher des magasins ultra-spécialisés, par exemple dans un sport en particulier, les généralistes ont tendance à se regrouper sous les mêmes enseignes.
Denis Stachowicz, fondateur et dirigeant de SCDR, membre du groupe de travail Achats d'EuroChef, constate également cette évolution : « Les regroupements, nous les voyons partout, dans le monde de l'automobile, avec Stellantis notamment. Il en va de même pour les cabinets de médecins, les avocats... Tout le monde s'efforce de devenir plus compétitif, et cela passe par des regroupements. »
La cuisine professionnelle n'échappe pas à la règle puisque nous sommes tous concernés par cette même dynamique, sur l’ensemble de la chaîne de valeur.
Les fabricants, entre rachats et consolidation
Le paysage des fabricants d'équipements de cuisine professionnelle est marqué par des mouvements de concentration importants depuis déjà plusieurs décennies. Quelques grands groupes internationaux rachètent progressivement des marques historiques pour étendre leur portefeuille et leur présence sur le marché.
Pour le groupe de travail Achats d'EuroChef, cette évolution est suivie de près. « C'est une donnée très importante que nous prenons en compte lors du référencement de nos fournisseurs. Nous les sélectionnons en partie en fonction de leur pérennité, de leur situation de leadership sur le marché, de leur notoriété », précise Denis Stachowicz. Être adossé à un grand groupe peut donc s’avérer rassurant à l’heure de sélectionner un nouveau partenaire fabricant.
Les géants de la fabrication
- Ali Group : le conglomérat italien possède une centaine de marques et couvre l’ensemble des besoins pour les métiers de la gastronomie et de l’hospitalité. Citons Dihr, Friginox, Comenda, Lainox ou encore Scotsman.
- ITW (Illinois Tool Works) : ce groupe américain possède de nombreuses marques parmi lesquelles Hobart, Bonnet, Vulcan ou Foster.
- Groupe Seb : l’acteur français fait son entrée sur le marché professionnel avec le rachat de Krampouz, Pacojet puis Charvet et Ambassade de Bourgogne, marques françaises historiques.
Installateurs et distributeurs : s'unir pour être plus forts
Au niveau des installateurs et distributeurs comme les associés de notre réseau, la tendance est également au regroupement, mais avec des spécificités propres à ce maillon de la chaîne. « Tout est en train de se concentrer. Demain, il restera toujours de petits artisans, mais il n'y aura plus d'entreprises "indépendantes", c'est-à-dire qui n'auront pas un poids national. Aujourd’hui déjà, la plupart des acteurs de premier plan font partie d’un groupement ou ont été rachetés par un plus gros acteur », analyse Vincent Bretonnière.
En 2024, 30 installateurs déclarent un chiffre d’affaires supérieur à 5 millions d’euros. Parmi eux, 6 seulement sont des indépendants (et 6 autres font partie de notre réseau).
Pour être performant, il faut acheter bien, et pour acheter bien, il faut avoir du poids. Cette réalité économique pousse naturellement les acteurs à se regrouper, soit au sein de réseaux comme EuroChef, soit par croissance externe via des rachats.
« Avant de rejoindre EuroChef en 2010 avec mon entreprise Dima, nous étions avec mon frère et associé, plutôt contre ce principe de regroupement de peur de perdre notre indépendance, mais aujourd'hui nous nous rendons bien compte que cela ne fait que sens », confie Vincent Bretonnière. « Nous avons pris l’une des meilleures décisions de notre vie professionnelle et en sommes fiers. D’autant que les fabricants et les clients font la même chose. »
François Sand, à la tête de Lanef Pro, témoigne de sa propre stratégie de croissance : « Notre entreprise a pu grandir et prendre rapidement de l’ampleur. Nous avons notamment racheté des structures pour répondre aux attentes de nos clients en Normandie. L'idée est de mailler le territoire et de proposer une réponse globale aux clients. »
EuroChef en chiffres
- 61 associés à travers la France
- 290 millions d'euros de CA cumulé par les associés en 2024
- Plus de 1200 salariés chez les associés
- Un réseau créé il y a 28 ans
Des clients entre concentration et uniformisation de la demande
Cette tendance à la concentration touche également les clients finaux, qu'il s'agisse de la restauration commerciale ou des collectivités, établissements de santé, scolaires ou secteur public. « Nos clients aussi se regroupent. Aujourd'hui il n'y a plus ou presque de maisons de retraite indépendantes », constate Vincent Bretonnière. « Nos clients eux aussi se concentrent. Tout le monde a les yeux rivés sur le Groupe Bertrand. Mais tout doucement, la tendance se généralise. » Hervé Baradat, responsable Grands Comptes chez EuroChef, observe cette évolution de près : « Dans les années 1990, 90 % des restaurants étaient indépendants, maintenant la restauration rapide et les chaînes dépassent la restauration traditionnelle. Les indépendants, s'ils ne sont pas différenciants, ferment. » Et Hervé Baradat d’égrener les noms des grands groupes de la restauration commerciale, le Groupe Bertrand bien sûr, Le Duff, Agapes, sans oublier le leader du fast-food McDonald’s.
La dynamique de centralisation se retrouve dans d'autres segments de clientèle. « Côté santé, il y a aussi des rapprochements d'enseignes. Par exemple pour les Ehpad, de gros groupes ont absorbé les plus petites structures », précise Hervé Baradat. « Les GHT (Groupements Hospitaliers Territoriaux) achètent pour des petites cliniques. Eux aussi s'unissent pour acheter mieux. » Et François Sand de confirmer : « Oui, nos clients s'organisent et se développent de manière nationale. Cela génère beaucoup de mouvements dans nos entreprises depuis quelques années, entre rachats et rapprochements. »
Le Groupe Bertrand, champion de la diversification
Hippopotamus, Léon, Pitaya, Joyo, Au Bureau, Volfoni et bien d’autres… Le Groupe Bertrand fait feu de tout bois et totalise plus de 1200 restaurants. Avec un rythme effréné de 150 ouvertures par an, le groupe annonce un chiffre d’affaires sous enseigne de 3 milliards d’euros.
La réponse d'EuroChef : un groupement qui préserve l'indépendance
Face à cette évolution globale du marché, et même avec un certain sens de l’anticipation, EuroChef a pu développer sa propre stratégie, conjuguant force du réseau et préservation de l'identité de chaque associé. « Notre objectif, chez EuroChef, est de couvrir le territoire national avec de vrais professionnels experts, pas spécialement d'être les plus nombreux », explique Vincent Bretonnière. « Notre réseau est maintenant complètement maillé. Nous sommes en capacité d’intervenir partout sur le secteur de la cuisine professionnelle. »
Cette approche permet au réseau de répondre efficacement aux besoins des grands comptes nationaux, tout en conservant l'agilité et la proximité des entreprises indépendantes. Denis Stachowicz témoigne : « Ce n'est pas vraiment difficile de faire partie d'un groupement tout en gardant son identité. D’une part, notre clientèle locale nous connaît, nous identifie, en dehors d'EuroChef. Mais lorsque nous mentionnons notre appartenance au réseau, cela nous donne un vrai poids commercial. C'est donc un double avantage : être reconnus au niveau local, avec une envergure nationale. »
Zoom sur la cellule Grands Comptes d'EuroChef
- Créée en 2016 sous l'impulsion d'Olivier Béguier
- Une équipe d'une vingtaine de personnes
- CA : de 1,5 million d’euros en 2016 à 25 millions d’euros en 2024
- Principaux clients : Économat des Armées, UGAP, Groupe Bertrand
- Projets 2025 : développement de l'offre SAV
Des besoins uniformisés pour les grands comptes
L'évolution des demandes clients illustre parfaitement cette tendance à la centralisation. Les grands groupes recherchent désormais des interlocuteurs capables de les accompagner sur l'ensemble du territoire. « Lorsque le Groupe Bertrand installe des restaurants Hippo, il veut un seul interlocuteur à la fois pour la conception, la commercialisation, l’installation et le SAV. Il veut un seul point de facturation et de contact, un seul point d'entrée », explique Vincent Bretonnière. « C'est là où EuroChef prend tout son sens. »
Offre de SAV & maintenance mutualisée : une réponse aux attentes du marché
La cellule Grands Comptes d’EuroChef propose maintenant une offre de SAV pour répondre aux demandes croissantes de ses clients. Cette offre s'appuie sur la mise en place d'un logiciel commun (eConnect) et sur l'harmonisation des pratiques entre tous les associés du réseau.
L'avenir entre concentration et niches d'indépendance
Comment évoluera le marché dans les prochaines années ? Les associés du réseau s'accordent sur une poursuite de la concentration, tout en préservant des espaces pour les acteurs spécialisés. « Je pense que le maillage intermédiaire tendra à disparaître, du moins en apparence », anticipe Vincent Bretonnière. « Il y aura même des groupements de groupements. À l'instant T, le train passe dans ce sens-là. » Denis Stachowicz partage cette vision : « Il va y avoir de plus en plus de grosses sociétés. Cependant il y aura toujours des indépendants qui occuperont des marchés spécifiques, des marchés de niche. Mais je pense qu’ils seront au final sous-traités par des sociétés plus grosses. »
Cette évolution pourrait même dépasser les frontières nationales. « Il est possible que demain il y ait des regroupements au niveau européen, voire mondial », suggère Denis Stachowicz.
Une approche en phase avec l’évolution du marché
Aujourd’hui plus que jamais, le réseau EuroChef continue de défendre un modèle qui préserve l'indépendance de ses associés. Un modèle organisationnel qui permet à chacun de faire entendre sa voix tout en s’appuyant sur une charpente solide et structurée. Pour François Sand, c'est cette alliance entre force collective et indépendance qui fait la spécificité d'EuroChef : « Il existe entre les associés un vrai sentiment d'entraide, c'est vraiment ce qui fait notre force. Nous le ressentons intrinsèquement et physiquement. »
La transformation du secteur de la cuisine professionnelle s'inscrit dans une tendance économique plus large. Face à la montée en puissance des grands groupes, EuroChef a su développer un modèle original, conjuguant la force d'un réseau national et la souplesse d'entreprises expertes indépendantes. Une approche qui semble particulièrement adaptée aux évolutions actuelles du marché. « Je me félicite tous les jours d'être dans le réseau EuroChef qui, grâce à Olivier Béguier, a compris l'importance des grands comptes dès 2016 », conclut François Sand.
Dans un contexte économique incertain, cette capacité d'adaptation sera plus que jamais déterminante pour l'avenir du secteur.