Repas en livraison, retrait : le point sur des services en mutation

Nous nous intéressons à une forme spécifique de la restauration : la livraison des repas. De plus en plus, les schémas traditionnels de la sortie au restaurant ou du repas à la maison sont concurrencés par de nouvelles possibilités : commander sur Internet et retirer son repas au point de vente, commander sur place et emporter chez soi, ou se faire livrer sans bouger de son domicile, par exemple.

Quels sont les impacts de ces nouvelles pratiques sur nos métiers ? Faut-il prévoir un changement de paradigme dans la manière dont est perçue la restauration dite traditionnelle ? Et ces nouveaux services sont-ils aujourd’hui sous-évalués ou surévalués en termes de parts de marché ? Nous allons tenter de répondre à ces problématiques en dressant un panorama du secteur.

Chiffres, acteurs, nouveautés… Ce qu’il faut savoir

Commençons par un bref mémo lexical, pour ne laisser personne sur le bord de la route (et parce que nous n’avons pas tous la même appétence ou les mêmes possibilités d’accès à ces services). De quoi parle-t-on précisément, lorsqu’on évoque les services de livraison ?

Le delivery ou livraison à domicile est un service assuré par une entreprise tierce. En 2023*, 88 % des restaurants proposant la livraison passaient par une société de livraison nationale. Deux acteurs occupent en France une situation de quasi-duopole** : Uber Eats (72 % des parts de marché) et Deliveroo (27 % des parts de marché).

Certains restaurateurs assurent eux-mêmes la livraison à domicile (c’est le cas depuis très longtemps pour les pizzas par exemple). Le take-away, ou “emporté” consiste à passer commande dans un restaurant, soit par téléphone, par Internet ou directement sur place (au comptoir ou via une borne de commande) et repartir avec son repas.

Enfin, il existe des points de retrait, où l’acheteur / consommateur vient retirer son produit dans un distributeur : pizza, baguette de pain, barquette de fruits, sandwich… Ces points de vente peuvent aussi bien appartenir à un groupe industriel qu’à un producteur ou un restaurateur.

Les services de delivery sont souvent associés au secteur de la restauration rapide, mais aujourd'hui, cette offre est beaucoup plus large. De nombreux restaurants “traditionnels” proposent eux aussi un service de livraison, espérant ainsi toucher une nouvelle clientèle. En 2023*, 43 000 restaurants indépendants proposaient un service de livraison, pour un chiffre d’affaires de 3,7 milliards d’euros. Il y a 2 ans, les commandes en livraison représentaient 26 % du chiffre d’affaires des points de vente. 42 % des Français avaient d’ailleurs eu recours à ce type de service.

La restauration hors domicile***, en 2024, reste stable en termes de visites. À l’intérieur, la restauration rapide tire son épingle du jeu, avec 14 % de dépenses en plus par rapport à l’étude précédente, menée en 2019. Selon une étude Circana, près d’un tiers du chiffre d’affaires global de la restauration hors domicile (cela comprend la restauration collective) va dans l’escarcelle de la restauration rapide. Une part de marché colossale qu’il est important d’avoir en tête. Ce bon résultat doit toutefois être nuancé : fonte du résultat brut d’exploitation, effet de la taxe soda et fin de l’allègement de certaines charges patronales ont fait remonter l’indice de vulnérabilité de 20 points.

Dans son rapport annuel de la restauration, Bernard Boutboul (voir interview ci-après) indique que le segment de la restauration rapide compte plus de 400 000 établissements, dont 158 000 sans service à table. Soit près de 40 % de “pure players”, qui proposent uniquement de la vente à emporter et/ou de la livraison.

*Étude Food Service Vision.

**Baromètre CDLK 2024.

***Étude 2024, Top 150 des majors de la restauration rapide chaînée.